Au lendemain d’un spectaculaire relèvement des taux d’intérêt, et alors que le rouble reste à un niveau historiquement bas, les autorités russes ont choisi le statu quo. Mercredi 16 août, le président, Vladimir Poutine, recevait des membres du gouvernement et la représentante de la Banque centrale de Russie, Elvira Nabioullina, pour discuter des moyens d’enrayer la chute de la monnaie nationale.
Signe que la question est délicate, aucun communiqué n’a été diffusé après la réunion. Le quotidien des affaires, Vedomosti, assurait toutefois, jeudi matin, que les participants avaient renoncé à la mesure la plus radicale – défendue par le ministre des finances, Anton Silouanov –, à savoir une obligation pour les entreprises exportatrices de changer en roubles la quasi-totalité de leurs revenus d’exportation dans un délai de quatre-vingt-dix jours. Une telle mesure, qui renforcerait un contrôle des mouvements de capitaux déjà strict, a apparemment été jugée trop risquée pour le bon fonctionnement de l’économie.
La décision de la banque centrale, lundi, de faire passer les taux d’intérêt de 8,5 % à 12 % n’a pourtant offert qu’un répit à la monnaie. Certes, le taux de change est repassé sous la barre psychologique et symbolique des 100 roubles pour un dollar, qui rappelle aux Russes les crises les plus dures traversées ces trente dernières années. Mercredi soir, la devise s’échangeait ainsi à 94,67 roubles pour 1 dollar et à 103,2 roubles pour 1 euro.
Mais, de l’avis général, notamment celui des analystes d’Alfa Bank, la hausse des taux ne suffira pas à inverser la tendance baissière. Depuis le début de l’année, le rouble ne cesse de se déprécier. Il a ainsi perdu près de 25 % face au dollar, une contre-performance qui le classe dans la même catégorie que la livre turque ou le peso argentin.
Déséquilibres de l’économie
Pour le budget fédéral, mis sous tension par le conflit en Ukraine, un rouble faible permet d’amoindrir le coût de l’effort de guerre. Et le pouvoir s’est abstenu pendant plusieurs mois de toute intervention sérieuse. Néanmoins, le risque inflationniste est désormais trop important. La hausse des prix a ainsi atteint 7,6 % sur les trois derniers mois, et les analystes prévoient que ceux des produits de première nécessité continuent d’augmenter.
Le risque est également politique : dans son show télévisé, le jeudi 10 août, le propagandiste Vladimir Soloviev avertissait des dangers d’une inflation débridée au moment de la campagne pour la réélection de Vladimir Poutine, en mars 2024. Le même évoquait aussi un « sujet de moquerie internationale ».
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