Pour le concert de Taylor Swift, Philippine, collégienne de 15 ans qui vit au Havre (Seine-Maritime), hésite encore sur sa tenue. « Ce sera un hommage à l’un de ses albums, soit Reputation [2017], soit Lover [2019] », affirme-t-elle. Ouf, elle a sa place pour voir la chanteuse la plus écoutée sur Spotify en 2023, dont elle se dit fan depuis ses 9 ans.
Mais tout ne s’est pas passé comme prévu. Car Philippine n’ira pas voir Taylor Swift à Paris, à deux heures de chez elle, où l’Américaine se produira au mois de mai. Accompagnée de sa mère et de deux amies, elle assistera à son concert deux semaines plus tard… à Madrid. « On s’était préinscrites pour Paris, mais on n’a pas été choisies », regrette-t-elle.
Choisies ? En fait, Philippine n’a pas reçu le « code » délivré sur tirage au sort par Ticketmaster, la plate-forme d’achat de billets, pour accéder à la vente parisienne. « Mais j’ai réussi à avoir un code pour Madrid en récupérant celui de quelqu’un sur Twitter. » Et puis, ce sera l’occasion de visiter Madrid pendant trois jours, dit-elle.
Des billets d’avion, des nuits d’hôtel, des dépenses sur place… Voilà, concrètement, l’effet Taylor Swift sur le tourisme européen. Attendue comme le messie par ses fans, la mégastar de 34 ans, « personnalité de l’année 2023 » pour le magazine Time, se produira au printemps dans dix-huit villes du continent. En France, elle remplira du 9 au 12 mai La Défense Arena (35 000 places vendues par soir), et puis le Groupama Stadium de Lyon (57 000 spectateurs par soir), les 2 et 3 juin.
Une tournée qu’Arnaud Meersseman, directeur d’AEG France, qui produit les concerts de Taylor Swift à Paris et Lyon, qualifie volontiers de « hors norme ». « On fait six dates, mais on aurait pu en faire douze », estime le producteur. Il supervisera une logistique d’enfer : 90 semi-remorques et 300 personnes accompagneront « The Eras Tour » – le nom officiel de la tournée. Au total, à Paris et à Lyon, plus de 250 000 personnes iront écouter l’autrice et interprète de Cruel Summer (2019) ou Shake It Off (2014). C’est à peine moins que Coldplay, qui a rassemblé 300 000 personnes en quatre soirs au Stade de France en 2022 – le record pour une tournée française.
Mais outre le nombre de spectateurs, la spécificité de ces concerts tient à l’intensité des déplacements qu’ils suscitent. Parce que les fans sont prêts à tout, et parce que le système d’achat de billets pousse à l’irrationalité. Le 11 juillet 2023, lors de la mise en vente des places pour Paris et Lyon, « il y a eu jusqu’à 1,2 million de personnes en liste d’attente », se souvient Arnaud Meersseman. Les serveurs de TicketMaster n’ont pas tenu, suscitant déception et énervement chez les fans, et alimentant encore plus la pression.
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