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En Amazonie, la découverte d’un vaste réseau de cités-jardins vieux de 2 500 ans

Des complexes de plates-formes rectangulaires disposés autour de places basses et distribués le long de larges rues creusées, sur le site de Kunguints, dans la vallée d’Upano en Equateur.

Fin 1541, l’Espagnol Francisco de Orellana, accompagné de quelques dizaines d’hommes, commence, sur les contreforts orientaux des Andes équatoriennes, un hallucinant voyage fluvial qui va lui faire traverser d’ouest en est tout le continent sud-américain, jusqu’à déboucher sur l’océan Atlantique via l’Amazone. C’est le dominicain Gaspar de Carvajal qui tient la chronique de ce dangereux périple d’une dizaine de mois, au cours duquel il perdra un œil, touché par la flèche d’un autochtone lors d’une embuscade.

Dans ce récit intitulé Descubrimiento del rio de las Amazonas (soit, en français, « découverte du fleuve des Amazones »), Carvajal dépeint des rives densément peuplées et une sorte d’agglomération urbaine : « Aucun village n’était distant de l’autre de plus d’un tir d’arbalète (…), et il y avait un village qui s’étendait sur cinq lieues sans interruption d’une maison à une autre, ce qui était une chose merveilleuse à voir. »

A l’époque, on prend cette description pour une affabulation. Pourtant, une étude internationale, publiée jeudi 11 janvier, dans la revue Science, met en évidence un réseau de cités-jardins, le long de la rivière Upano, en Equateur, remontant à 500 avant notre ère. Soit le plus ancien et le plus grand réseau urbain de l’Amazonie. Comme le prétendaient Carvajal et Orellana, tout oxymorique qu’elle puisse paraître, la ville amazonienne préhispanique est bien une réalité.

« Strip-tease extrême » de la Terre

Un des principaux sites de la zone, baptisé Sangay, comme le grand volcan qui trône non loin, a été découvert dès la fin des années 1970, mais c’est grâce aux travaux du Français Stéphen Rostain que l’archéologie de la forêt amazonienne a pris une véritable épaisseur. L’article de Science, dont il est le premier signataire, condense vingt-cinq années d’études de ce directeur de recherche au CNRS. Sur le terrain, Stéphen Rostain pratique des décapages de grandes surfaces et découvre des vestiges d’habitations au sommet de monticules artificiels, des petites plates-formes de terre érigées pour s’élever par rapport à un sol gorgé d’eau.

Il identifie des centaines de ces tertres, mais ce n’est rien par rapport à ce que livre une couverture Lidar (pour Laser imaging detection and ranging), effectuée en 2015. Analogue au radar mais remplaçant les ondes radio par du laser, cette technique de télédétection est mise en œuvre grâce à des appareils embarqués dans des aéronefs qui survolent la forêt, et elle a pour avantage de passer à travers celle-ci : « C’est une technologie qui déshabille la Terre de sa végétation et révèle le modelé exact du sol. C’est le strip-tease extrême et le nirvana pour les archéologues », s’exclame Stéphen Rostain.

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