Alors que les élections européennes, prévues le 9 juin, approchent, les différents camps politiques commencent à affûter leurs arguments. C’est à cet exercice que s’est livré, dimanche 14 janvier, par le truchement de plusieurs médias, l’eurodéputé (S&D, Place publique) Raphaël Glucksmann, qui souhaiterait conduire la liste socialiste en France.
Entre autres, il a accusé, dans un entretien au Monde, l’Elysée d’avoir « bloqué la directive sur les travailleurs des plates-formes qui donnerait des droits à des millions de travailleurs exploités par Uber et les autres ». Avant d’asséner sur France Inter qu’« Emmanuel Macron se montre proeuropéen jusqu’à ce que des intérêts privés puissants soient heurtés ».
Comprendre : sous la pression d’Uber et autres Deliveroo, l’Elysée empêche les avancées sociales pour ce pan de l’économie numérique que permettrait le texte, présenté par la Commission européenne en décembre 2021 et en cours de négociations, depuis, entre le Parlement européen et les Vingt-Sept.
De fait, le 22 décembre 2023, à l’occasion d’une réunion des ambassadeurs des Etats membres auprès de l’Union européenne (UE), Paris a fait connaître son opposition au compromis auquel étaient parvenus, neuf jours plus tôt, les élus de Strasbourg et la présidence du Conseil de l’UE – alors occupée par l’Espagne –, censée représenter les capitales.
Une dizaine d’autres pays étaient sur la ligne française, dont la Pologne et la Hongrie – soucieuses de conserver l’avantage comparatif que leur vaut une législation sociale moins disante –, mais aussi la Grèce, les pays baltes – notamment l’Estonie, qui veut protéger son champion, Bolt – ou encore les Scandinaves, attachés à leur modèle de négociation collective.
« Modèle social européen »
Face à l’explosion des plates-formes, dans la livraison de repas ou dans le secteur de la mobilité, les Européens souhaitaient à la fois harmoniser et améliorer les conditions de travail d’un secteur peu régulé qui emploie aujourd’hui 28 millions de personnes – en 2025, ils devraient être 43 millions – et les fait travailler, dans 90 % des cas, avec le statut d’indépendant.
Dans ce contexte, la Commission avait proposé, en 2021, que les indépendants, qui font vivre les plates-formes, se voient accorder le statut de salarié, dès lors que la relation qui les attache à leur employeur les installe dans une position de subordination. Elle énumérait une liste de critères qui devaient permettre de définir les conditions dans lesquelles une plate-forme « est présumée être employeur et ses travailleurs sont présumés être salariés ».
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