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« Aimons-nous assez le monde et les enfants ? »

Le sujet de notre responsabilité collective envers les enfants semble se résumer de plus en plus aux deux questions suivantes : faut-il en avoir ou pas ? Et comment faire pour leur laisser un monde le moins abîmé possible ? La première question est pertinente, et de plus en plus aiguë pour celles et ceux qui se la posent dans un monde qui brûle ; la deuxième est absolument incontournable.

Comme le dit le proverbe tiré d’une phrase de Wendell Berry, un poète paysan américain, « nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants ». Or, dans notre société gérontodictée, les décisions sont prises pour un électorat plus âgé que jamais qui ne sera bientôt plus là pour en vivre les conséquences.

Notre responsabilité envers les enfants va cependant bien plus loin que la lutte contre le changement climatique. Et notre incapacité à prendre en compte leurs intérêts sur ce sujet est le symptôme d’un problème de fond : la France accuse un retard préoccupant sur la question de l’enfance.

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Notre pays est avant-dernier de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour le développement des compétences sociocomportementales – notamment l’estime de soi, la capacité à collaborer, la persévérance, le respect –, qui ont des effets importants sur la capacité à apprendre, et donc sur la réussite scolaire puis professionnelle, mais aussi sur le bien-être psychologique tout au long de la vie – et sur notre capacité à constituer une société apaisée.

Doublement coupables

Selon le rapport Innocenti 13 de l’Unicef, la France est vingt-huitième sur trente-cinq pays riches en matière d’inégalités de bien-être entre les enfants. Dans son rapport 2020, le Défenseur des droits souligne d’ailleurs que les enfants témoignent « d’un manque de considération de leur personne, de leurs avis et de leurs rêves par les adultes qui les entourent ». Nous peinons à envisager les enfants comme des membres de la société à part entière – notamment dans l’espace public, où l’on n’aime rien tant que de se plaindre de leur présence.

Nous sommes donc doublement coupables envers les générations « futures » : nous ne prenons pas assez soin des enfants d’aujourd’hui et nous ne tenons pas compte de leurs intérêts dans les décisions qui façonneront demain. Prendre vraiment soin des enfants, ce serait leur permettre de devenir des adultes capables de garantir une « vie bonne » pour eux-mêmes, pour les autres, pour le monde. Comme l’écrivait Hannah Arendt (1906-1975) en 1961, « l’éducation est le point où se décide si nous aimons assez le monde pour en assumer la responsabilité [et] si nous aimons assez nos enfants pour (…) les préparer d’avance à la tâche de renouveler notre monde commun ».

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