C’est la première étape d’un chemin encore incertain. Les députés de la commission des lois ont approuvé, mercredi 17 janvier, l’inscription dans la Constitution de « la liberté garantie » pour une femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG). Cette décision intervient quarante-neuf ans jour pour jour après la promulgation de la loi Veil sur la dépénalisation de l’IVG. Sauf surprise, les députés devraient voter cette mesure emblématique le 24 janvier, mais son issue au Sénat reste floue.
Alors que l’accès à l’IVG est remis en cause dans plusieurs pays, et notamment aux Etats-Unis, suscitant l’inquiétude, le texte du gouvernement prévoit d’inscrire dans la Constitution le fait que « la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours » à l’IVG.
Il tente de trouver une voie médiane entre l’Assemblée, qui avait adopté à la fin de 2022 un texte de La France insoumise pour garantir « l’effectivité et l’égal accès au droit à l’IVG », et le Sénat, qui avait adopté une version modifiée évoquant la « liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse ». Mardi, le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, avait vanté un « texte équilibré » du gouvernement.
Des craintes à droite et à l’extrême droite
Si les débats ont été de bonne tenue, la formulation du projet de réforme inquiète des parlementaires des Républicains (LR) et du Rassemblement national (RN) – certains députés de ces groupes ont voté contre, mercredi, selon des sources parlementaires consultées par l’Agence France-Presse. « Cette liberté fondamentale (…) n’est pas menacée en France », a affirmé la députée Pascale Bordes (RN). Elle est remise en cause dans le monde et « en France à travers des attaques contre des associations telles que le Planning familial », a rétorqué le rapporteur du texte, Guillaume Gouffier (Renaissance).
Avec la constitutionnalisation, « on pourrait craindre qu’il devienne alors possible d’exiger une IVG jusqu’à son terme ou en raison du sexe » et « cela pourrait aboutir à remettre en question la clause de conscience des soignants », a assuré Patrick Hetzel (LR). « Ce projet de loi ne crée pas de droit opposable », a insisté le rapporteur, citant également l’avis du Conseil d’Etat qui estime que le texte « ne remet pas en cause » la liberté de conscience.
Les groupes LR et RN pourraient toutefois se diviser dans l’Hémicycle entre votes pour, contre, et abstentions, comme ils l’avaient fait lors de l’adoption d’une précédente loi portée par la présidente du groupe La France insoumise, Mathilde Panot.
En cas d’adoption dans l’Hémicycle, le texte irait ensuite au Sénat, dominé par la droite et le centre. Si ce dernier venait à l’adopter dans les mêmes termes, une hypothèse incertaine à ce stade, un Congrès réunissant les parlementaires à Versailles serait convoqué le 5 mars, pour une adoption définitive nécessitant trois cinquièmes des voix.