Carnet de bureau. Lorsque le marché de l’emploi se tend, des dossiers de licenciement reviennent sur le bureau des DRH. Deux arrêts de la Cour de cassation pris fin 2023 risquent de faciliter la tâche des employeurs aux dépens des salariés. « La Cour de cassation admet que des moyens de preuve déloyaux peuvent être présentés au juge dès lors qu’ils sont indispensables à l’exercice des droits du justiciable », indique le communiqué de la haute juridiction publié le 22 décembre. « Toutefois, la prise en compte de ces preuves ne doit pas porter une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux de la partie adverse (vie privée, égalité des armes, etc.) », précise-t-elle. Autrement dit, la preuve obtenue de façon déloyale est désormais valable, mais à certaines conditions.
Les deux affaires jugées concernaient, d’une part, un responsable commercial de la société Abaque Bâtiment Services licencié pour faute grave le 16 octobre 2016 sur la base des enregistrements de deux entretiens à l’insu du collaborateur ; et, d’autre part, un salarié de la société Rexel Développement licencié le 9 décembre 2015, également pour faute grave, en raison des propos insultants tenus à l’encontre de son supérieur hiérarchique et de son remplaçant lors d’un échange électronique sur sa messagerie privée, hébergée sur son ordinateur professionnel.
Durant son congé, son remplaçant a consulté son compte Facebook, qui n’avait pas été déconnecté, a lu le message qui sous-entendait que ledit remplaçant avait obtenu son poste grâce à son orientation sexuelle et l’a transféré à la hiérarchie.
Au juge de trancher
Depuis 2011 et jusqu’alors, des enregistrements clandestins ou autres stratagèmes de l’employeur pour justifier un licenciement étaient automatiquement irrecevables devant les prud’hommes. La reconnaissance pour preuve de documents obtenus de manière déloyale, même sous conditions, marque ainsi un revirement certain du traitement des dossiers de salariés. Les deux licenciés, qui contestaient la façon déloyale dont les preuves avaient été obtenues, ont été déboutés.
Pourquoi ce revirement de jurisprudence ? Dans la première affaire, pour « ne pas priver un justiciable [l’employeur] de la possibilité de faire la preuve de ses droits, lorsque la seule preuve disponible pour lui suppose, pour son obtention, une atteinte aux droits de la partie adverse », répond la Cour de cassation. Et dans la seconde, parce que la loyauté de la preuve n’était pas le sujet. Une conversation privée ne peut motiver un licenciement que si elle constitue « un manquement du salarié aux obligations découlant du contrat de travail », précise la Cour.
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