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Editer et pratiquer l’histoire des sciences

Comment mesurer le succès public de l’histoire des sciences ? Deux ouvrages récents dirigés par Emanuel Bertrand et Wolf Feuerhahn viennent apporter un éclairage nouveau sur celle de cette discipline. Le premier, Editer l’histoire des sciences (France, XXe siècle). Entre sciences et sciences humaines (Presses de l’Enssib, 2023), dirigé aussi par Valérie Tesnière, aborde, par une série d’études de cas, le rôle joué par certains éditeurs, certaines collections, dans la diffusion de l’histoire des sciences depuis une quarantaine d’années.

Comme on le sait, l’institutionnalisation de la discipline s’est appuyée sur la création de centres de recherche (Institut d’histoire des sciences et des techniques en 1932, Centre Alexandre-Koyré en 1958, Centre de sociologie de l’innovation en 1967, etc.). Moins microcommunauté soudée qu’« ensemble de chercheurs aux statuts variés » venant de disciplines très différentes, l’histoire des sciences a trouvé dans l’édition une manière de dépasser cette hétérogénéité devant un grand public, selon les auteurs.

Portant sur la France, l’enquête sur les supports (revues, ouvrages, collections), les maisons (La Découverte, Gallimard, Seuil, Odile Jacob, etc.) comme sur les acteurs (traducteurs, éditeurs, lecteurs) montre la variété des entreprises éditoriales. L’ouvrage retrace aussi bien le paysage éditorial des sciences humaines que l’histoire des grandes synthèses et montre les découpages académico-éditoriaux des savoirs selon les maisons d’édition. Paradoxalement, « le renouvellement récent de l’histoire des sciences n’est pas passé par un renouvellement de ses formes éditoriales » en consacrant toujours plus de place à des genres traditionnels comme la biographie ou l’autobiographie, conclut Elisabeth Parinet.

Une variété de méthodes et d’enjeux

Le second livre, Arpenter l’histoire des sciences. Témoignages de chercheurs français contemporains (Presses universitaires de Strasbourg, 2023), appartient au genre des essais d’égo-histoire. Cependant, l’enquête fondée sur un questionnaire adressé à des historiens et des philosophes des sciences éminents est plus marquée par une réflexion épistémologique autour de la discipline que par l’égotisme.

Ces grandes figures qui ont marqué la discipline, de Michel Serres à Bertrand Saint-Sernin en passant par Jean-Marc Lévy-Leblond, Roshdi Rashed, Jean Dhombres, Daniel Roche, Jean-Pierre Dupuy, Christian Topalov, Victor Karady, Denis Woronoff, ou Anne Fagot-Largeault et Hourya Sinaceur, montrent la variété des enjeux et des parcours. Premier constat frappant, beaucoup de ces figures évoquent, comme Daniel Roche ou Jean-Marc Lévy-Leblond, une position d’extériorité, ou de marginalité active, comme si le centre de la discipline restait introuvable.

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