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Crise agricole : face à la menace d'un "siège" de Paris, l'Intérieur promet un "dispositif défensif"

Alors que les agriculteurs prévoient d’entamer un « siège de Paris » à partir de lundi, le gouvernement a promis dimanche un « dispositif défensif important ». Au total, quelque « 15 000 » membres des forces de l’ordre doivent être mobilisés pour empêcher que les tracteurs entrent dans « Paris et les grandes villes », a annoncé le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.

Le gouvernement a promis, dimanche 28 janvier, un « dispositif défensif important » face à la volonté d’agriculteurs d’entamer un « siège » de Paris à partir de lundi, tandis que la FNSEA a appelé au « calme » mais prévenu que la mobilisation de la profession resterait « totale ».

Alors que le Premier ministre Gabriel Attal, de retour sur le terrain, a juré « d’avancer vite » pour répondre à la colère des agriculteurs, le président du premier syndicat agricole français a exhorté le gouvernement à « aller beaucoup plus loin ».

« On n’a pas bien vécu ce qui s’est passé la semaine dernière : la com’, les caméras, le ballot de paille et tout ça, ce n’est pas notre truc. Ce qu’il nous faut nous, c’est des décisions dont on sent qu’elles changent le logiciel », a lancé Arnaud Rousseau, face à des paysans bloquant l’autoroute A16 à la hauteur de Beauvais (Oise).

Malgré une accalmie, de nombreuses liaisons routières sont restées coupées dimanche, de la Normandie au Gard en passant par les Pyrénées-Atlantiques et la Meuse.

Et la situation menace de se tendre avec un projet de blocage d’accès à Paris lundi à partir de 14 h.

« Tout va s’organiser dans la sécurité autour de plusieurs points de blocage sur des axes stratégiques autoroutiers importants, il va y avoir sept points de blocage tout autour de Paris », qui seront tenus « par des tracteurs, des agriculteurs », a affirmé Clément Torpier, président des Jeunes Agriculteurs Ile-de-France, sur BFMTV.


 

Dimanche, à 18 h, Gérald Darmanin a organisé une réunion interministérielle de crise consacrée à la colère des agriculteurs, à laquelle a participé le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau.

La réunion s’est tenue après que le ministre de l’Intérieur a demandé dans la matinée de mettre en place un « dispositif défensif important » afin d’empêcher tout blocage du marché de Rungis, des aéroports franciliens et l’entrée dans Paris des agriculteurs.

Dès le début de soirée, des forces de l’ordre, dont des blindés de la gendarmerie, ont été déployées aux abords de Rungis.

Dimanche soir, Gérald Darmanin a annoncé que 15 000 membres des forces de l’ordre seraient mobilisées lundi pour empêcher que les tracteurs entrent dans « Paris et les grandes villes », ainsi que les blocages du marché de Rungis et des aéroports franciliens.

Il a fait part en outre d’une « modération » demandée aux forces de l’ordre, qui ne devront pas « intervenir sur les points de blocages » mais les « sécuriser ».

Les forces de l'ordre ont été déployées aux abords du marché de Rungis, à la veille d'une nouvelle journée de mobilisation des agriculteurs qui menacent Paris et le marché de Rungis d'un "siège".
Les forces de l’ordre ont été déployées aux abords du marché de Rungis, à la veille d’une nouvelle journée de mobilisation des agriculteurs qui menacent Paris et le marché de Rungis d’un « siège ». © Julien de Rosa, AFP

« Semaine de tous les dangers »

Le mouvement des agriculteurs a annoncé la couleur. Comme l’a déclaré Clément Torpier : « il va y avoir une organisation militaire, il est hors de question qu’un nouvel accident arrive » après celui qui a coûté la vie à une agricultrice et sa fille en Ariège.

Place Beauvau, on affirme : « La posture reste la même : les forces de l’ordre doivent agir avec grande modération ».

Selon Arnaud Rousseau, la séquence qui s’ouvre est celle d’une « semaine de tous les dangers, soit parce que le gouvernement ne nous entend pas, soit parce que la colère sera telle qu’ensuite chacun prendra ses responsabilités ».

De son côté, Gabriel Attal a concédé « que, à travers ces premières mesures (annoncées vendredi, NDLR), on n’a pas répondu encore à tout ce que je viens d’évoquer et ce qui constitue le malaise et le mal-être de nos agriculteurs aujourd’hui ».

« Et je suis résolu à avancer, avancer résolument, à avancer vite », a déclaré le Premier ministre à La Riche (Indre-et-Loire). Peu auparavant, dans une ferme au nord-est de Tours, Gabriel Attal a été interpellé sur de multiples volets de la crise : baisse des revenus, retraites faibles, complexité administrative, inflation des normes, concurrence étrangère…

« Je veux qu’on clarifie les choses et qu’on voie les mesures que l’on peut prendre, supplémentaires, sur ces histoires de concurrence déloyale », a assuré le chef du gouvernement.

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Le gouvernement « responsable » pour Marine Le Pen

« Je lui confirme, il faut aller beaucoup plus loin », a répondu Arnaud Rousseau, qui a présenté des dizaines de doléances au gouvernement cette semaine : « tant que ces demandes ne seront pas satisfaites, la mobilisation sera totale », a-t-il dit.

Face aux annonces du gouvernement, les réactions divergent entre ceux qui estiment avoir obtenu satisfaction et ceux qui pensent que le compte n’y est pas.

Parmi les premiers, Joël Tournier, l’un des porte-parole du mouvement à Carbonne (Haute-Garonne), avec l’éleveur Jérôme Bayle : « On a été entendus, on a eu quelques réponses » même si « tout ne sera pas parfait de suite », juge-t-il pour expliquer la décision de lever samedi le barrage emblématique sur l’A64.

Mais plus au sud à Bayonne, une centaine d’agriculteurs bloquait toujours le pont de l’A63, point névralgique du trafic de et vers l’Espagne. Les déclarations de Gabriel Attal dimanche n’ont « répondu à rien du tout », a affirmé à l’AFP Éric Mazain, membre du bureau de la FDSEA 64, en promettant de « continuer à faire des actions » à l’avenir.

Gabriel Attal a dévoilé vendredi des mesures d’urgence, dont l’abandon de la hausse de la taxe sur le gazole non routier (GNR), des indemnités gonflées pour les éleveurs dont les bovins ont été touchés par la maladie hémorragique épizootique, des sanctions lourdes contre trois industriels de l’agro-alimentaire ne respectant pas les lois Égalim sur les prix.

Mais le président des Républicains Éric Ciotti a jugé ces réponses « ridiculement faibles » et plaidé, dans un entretien au Journal du Dimanche, pour un revenu minimum net mensuel des agriculteurs de 1 500 euros.

De son côté, en déplacement dans une exploitation agricole à Radinghem-en-Weppes (Nord), la cheffe de file de l’extrême droite, Marine Le Pen, a dénoncé la politique agricole du gouvernement. « Ils ne remettront pas en cause le modèle » qu’ils soutiennent « au niveau de l’Union européenne », « qui est un modèle qui tue l’agriculture », a-t-elle dit, estimant qu’il fallait « sortir l’agriculture des accords de libre-échange ».

Elle s’est par ailleurs refusée à se prononcer sur le blocage annoncé de Paris. « Je suis pour que le gouvernement agisse et si le gouvernement agissait, il n’y aurait pas de blocage », a-t-elle affirmé. « Qui est responsable des blocages ? Le gouvernement », a-t-elle ajouté avant de tourner les talons.

Avec AFP


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