C’est une pierre dans le jardin du Sénat. Le gouvernement et l’Assemblée nationale sont tombés d’accord pour considérer que le recours aux cabinets de conseil par les collectivités locales de plus de 100 000 habitants devait, comme pour l’Etat, être encadré. Cette disposition, introduite par un amendement de l’exécutif, a été votée jeudi 1er février par les députés dans la proposition de loi encadrant les dépenses de conseil des pouvoirs publics. Adoptée en première lecture, elle concerne donc les régions, les départements ainsi que les communes (42 d’entre elles) et 145 établissements publics de coopération intercommunale.
Le texte examiné venait du Sénat, où il avait été adopté en octobre 2022. Il n’y était alors question que de l’encadrement des prestations de conseil commandées par l’Etat. Car c’est en son sein, en effet, que la seconde chambre avait décelé, dans un rapport accablant publié en mars 2022, l’emprise massive et croissante des cabinets de conseil sur les affaires publiques. En 2021, l’Etat avait dépensé plus de 1 milliard d’euros pour ces missions, soit le double du montant constaté avant l’élection d’Emmanuel Macron en 2017.
La proposition de loi votée en 2022 au Sénat renforçait les obligations de transparence, prohibait certaines pratiques, comme les prestations à titre gratuit, imposait une évaluation par l’administration et accroissait la prévention des conflits d’intérêts. Le gouvernement avait déjà tenté d’élargir le champ d’application de ces mesures aux collectivités locales. Mais les sénateurs s’y étaient opposés.
« J’estime qu’il faut les intégrer dans le périmètre de la proposition de loi », a affirmé la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement, Marie Lebec, lors des débats à l’Assemblée nationale, jeudi, au nom de « la transparence ». « Prenons l’exemple de la région Nouvelle-Aquitaine, a illustré Sacha Houlié, député Renaissance de la Vienne : six millions d’habitants, un territoire grand comme l’Autriche… » Bref, « de véritables Etats », abonde Jean-Paul Mattei. Le député des Pyrénées-Atlantiques, président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, considère que « tout le monde doit s’appliquer les mêmes règles de transparence puisqu’il s’agit d’argent public ».
Chercher à braquer les sénateurs
Dans les rangs du Parti socialiste, la députée de Saône-et-Loire Cécile Untermaier est sur la même ligne. A contrario, la députée Horizons (le mouvement de l’ex-premier ministre Edouard Philippe) de Seine-Maritime, Marie-Agnès Poussier-Winsback voit là « une ligne rouge ». « Les collectivités locales ne sont pas l’Etat, considère-t-elle. Dans les premières, il y a des garde-fous et des contrôles à tous les niveaux. On va ajouter de la défiance et de la lourdeur alors qu’on n’arrête pas de dire qu’il faut simplifier. »
Il vous reste 40% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.