Le fort Foch, à Niederhausbergen (Bas-Rhin), dans la périphérie de Strasbourg, sert depuis une trentaine d’années de lieu de quarantaine et de transit pour des primates non humains (PNH) destinés à la recherche expérimentale. Le laboratoire Silabe, dépendant de l’université de Strasbourg, est le point d’entrée d’environ 15 % de macaques utilisés dans des laboratoires publics et privés en Europe. Une activité combattue par l’association Pro Anima, qui promeut une « recherche de pointe ne faisant pas appel aux animaux de laboratoire » et vise la « fermeture définitive » de l’établissement, selon les termes de Sylvia Hecker, sa vice-présidente.
Le tribunal administratif de Strasbourg vient d’offrir une victoire à l’association, par une décision du 30 janvier. Celle-ci annule un arrêté de 2020 de la préfète du Bas-Rhin qui donnait agrément au Silabe « pour l’importation, la fourniture et l’utilisation des animaux à des fins scientifiques ». En conséquence, une deuxième demande de renouvellement de cet agrément va devoir être examinée, après l’organisation d’une procédure de consultation du public. Jusqu’à la délivrance de cet agrément, le Silabe devra « maintenir le site dans un état de fonctionnement minimal par la gestion de ses affaires courantes et en veillant au bien-être des primates sans poursuite de ses activités », ont décidé les juges.
Le cabinet d’avocats Huglo Lepage, qui représente Pro Anima, a su trouver la brèche en s’appuyant sur le code de l’environnement : le Silabe produit des déchets et rejette ses eaux usées dans le réseau public d’assainissement, et il est « susceptible d’occasionner, du fait d’accidents de laboratoire, des risques pour les milieux naturels », note le tribunal. En conséquence, une consultation du public aurait dû être organisée. C’est ce vice de forme préfectoral qui conduit à la mise à l’arrêt du Silabe. L’université de Strasbourg a fait savoir le 14 février qu’une nouvelle demande d’agrément avait été déposée en préfecture et que celle-ci « s’apprête à lancer ladite consultation ».
Une guérilla administrative « usante »
Celle-ci n’est pas un référendum pour ou contre l’activité du Silabe, « mais une information du public sur ses effets », reconnaît Benjamin Huglo, défenseur de Pro Anima, pour qui « cette affaire démontre une nécessité de transparence ». Il note que le juge administratif n’a pas tranché sur un autre aspect de la requête, à savoir la nature de l’activité du Silabe. Si celui-ci conduit des recherches scientifiques en propre, la « plate-forme offre des prestations pour des tiers : à quel moment bascule-t-on dans une activité commerciale, d’élevage d’animaux ?, s’interroge-t-il. Auquel cas il y aurait détournement de procédure ».
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