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« Comment mieux accompagner la transition environnementale sur le marché du travail ? »

On l’oublie trop souvent, mais le système d’assurance-chômage que nous connaissons aujourd’hui n’est apparu qu’en 1958. A l’époque de la création de la Sécurité sociale, plus de dix ans auparavant, le chômage est considéré comme un risque trop peu important pour être pris en compte. C’est dans les années 1950, notamment sous l’impulsion des pionniers du système de sécurité sociale français, comme Pierre Laroque, le premier directeur général de la Sécurité sociale, que cela change. S’impose peu à peu l’idée d’une assurance-chômage nationale et publique qui viendrait remplacer le système d’alors combinant des caisses d’assurances syndicales et privées et un régime d’assistance étatisé.

Cette volonté de réforme n’est pas motivée par un chômage de masse, mais par la nécessité d’accompagner les transformations structurelles de l’économie française. En effet, on considérait que, si les mutations industrielles mettaient en difficulté les travailleurs de certains secteurs, cela risquait de freiner ces transformations, ou d’en ignorer les coûts pour ces travailleurs : il fallait trouver un moyen de compenser la perte de salaire.

Si le système français d’assurance-chômage a beaucoup évolué depuis, la transition environnementale repose la question de sa capacité à accompagner les mutations du marché du travail. D’après le rapport Pisani-Ferry – Mahfouz, huit secteurs concentrent 70 % des émissions de gaz à effet de serre, mais à peine plus de 5 % des emplois. La décarbonation de l’économie affectera forcément les travailleurs de ces secteurs.

Si l’on en croit les meilleures estimations, l’effet de la transition sur le nombre total d’emplois devrait être proche de zéro, mais elle s’accompagnera aussi de réallocations entre secteurs et métiers et celles-ci ne seront pas indolores. Nous rencontrons donc les mêmes problèmes que les créateurs de l’assurance-chômage : face à ces coûts, faut-il freiner la transformation nécessaire de notre économie ou trouver un moyen de compenser l’écart de salaire pour les travailleurs des secteurs les plus polluants ?

Coût d’opportunité

Les données du problème ont changé depuis 1958. Notre société est plus riche et plus complexe, et le coût de la perte d’emploi dépasse le seul temps passé au chômage. D’après l’Insee, 35 % des chômeurs étaient pauvres en 2021, contre 14,5 % des Français. Mais le coût de la perte d’emploi s’étend au-delà du chômage, les travaux des économistes ont montré qu’il se matérialisait aussi par un salaire plus faible à la reprise de l’emploi : il baisse en moyenne de 7 % sur une longue période. Or, cette perte de revenu n’est pas couverte par notre système d’assurance-chômage. Les travailleurs affectés par les politiques environnementales devront-ils la supporter seuls ?

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