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Loi « immigration » : comment la droite a épousé les chevaux de bataille de l’extrême droite

Le président du groupe Les Républicains au Sénat, Bruno Retailleau, le 6 novembre 2023 à Paris.

Bruno Retailleau n’était en 1990 encore qu’un jeune conseiller général de Vendée lorsque la droite, dans toute sa diversité, se cherchait une ligne commune sur l’immigration. Après deux jours de convention à Villepinte (Seine-Saint-Denis), elle est tracée très proche de celle de Jean-Marie Le Pen, avec pour mots d’ordre la « fermeture des frontières ». Trente-trois ans plus tard, le groupe Les Républicains (LR) du Sénat, dirigé par l’élu vendéen, a en partie exaucé les vœux de Jacques Chirac, de Valéry Giscard d’Estaing et de Charles Pasqua, dans un contexte similaire : la montée de l’extrême droite.

Lors de l’examen du projet de loi « immigration », la droite, majoritaire au Palais du Luxembourg (avec l’appui de l’Union centriste), a fait adopter plusieurs propositions radicales, parfois avec l’assentiment du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, toujours avec les voix de l’extrême droite. La liste est longue et non exhaustive : instauration de quotas migratoires annuels ; fin de l’automaticité de la naturalisation par le droit du sol ; durcissement du regroupement familial et de l’accès aux titres de séjour ; suppression de l’aide médicale d’Etat (AME) au profit d’une aide médicale d’urgence (AMU) ; restriction de certaines prestations sociales aux étrangers présents en France depuis cinq ans ; rétablissement du délit de séjour irrégulier.

Les débats ont donné lieu à un alignement de LR sur les thèses de l’extrême droite, illustré par le dépôt d’amendements similaires entre la sénatrice LR Valérie Boyer et Stéphane Ravier, seul élu du parti Reconquête ! d’Eric Zemmour. Pour Olivier Faure, patron du Parti socialiste, la preuve est faite que « l’extrême droite est en train de gagner la bataille culturelle : sa principale notabilisation, c’est le fait que d’autres partis reprennent ses propositions ». « Dans l’esprit, le thème d’une population immigrée qui viendrait profiter d’un Etat protecteur et généreux appartient clairement au répertoire historique du RN », confirme le politiste Bruno Cautrès, chercheur au Centre de recherches politiques de Sciences Po.

Vieilles antiennes

Ce répertoire est joué par la droite depuis dix ans, et la fin du mandat de Nicolas Sarkozy. La transformation de l’AME en AMU ou la fin de l’automaticité de la naturalisation sont de vieilles antiennes, présentes dans les programmes de François Fillon et de Valérie Pécresse, tout comme l’instauration de quotas d’immigration ou les restrictions du regroupement familial. Ces propositions sont moins radicales que celles du Front national. Marine Le Pen, et son père avant elle, défendait la suppression totale de l’AME, avant de s’aligner sur la droite en 2022. Quant au droit du sol, le RN veut le supprimer et restreindre l’obtention de la nationalité aux enfants d’un parent français ou à « des critères de mérite et d’assimilation ».

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