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« L’épargne est la solution de bon sens pour financer l’avenir de l’Europe »

L’idée n’est pas neuve, c’est même franchement le monde d’avant. Elle n’en est pas moins révolutionnaire : mobiliser l’épargne des citoyens européens pour financer l’avenir du Vieux Continent, alors que celui-ci fait face à un mur d’investissements pour la transition écologique, l’innovation, l’intelligence artificielle, ou encore la défense et la sécurité. Le principe est potentiellement aussi extravagant que la création de l’euro. Ce qui le rend à la fois complexe et inflammable politiquement. Car il suppose, en clair, de créer des marchés financiers communs à un moment où l’Europe est contestée.

Pourtant, les enjeux sont colossaux. « Il y a 35 000 milliards d’euros d’épargne privée en Europe, a martelé le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, lors d’un déplacement à Berlin, lundi 18 mars. L’argent est là, mais il ne va pas là où il fautUn tiers dort sur des comptes et un tiers finance l’économie américaine. » En face, les besoins pour financer ne serait-ce que la décarbonation de nos économies et, plus généralement, la transition écologique s’élèvent, selon les sources, entre 500 et 700 milliards d’euros par an.

Le calcul est vite fait. Les finances publiques des Etats membres de l’Union européenne (UE) sont exsangues, au sortir de deux crises successives, le Covid-19 et l’inflation. Celles de la France un peu plus que d’autres. Mais tous les grands Etats sont confrontés au défi du vieillissement démographique, qui fragilise leur capacité à créer de la richesse, et à des besoins immenses d’investissement. Pour y répondre, les instruments ne sont pas nombreux. Les Etats-Unis et la Chine mobilisent sans complexe de l’argent public, par le biais des crédits d’impôts ou des subventions. Des leviers difficiles, voire impossibles, à utiliser dans une Europe divisée. L’Allemagne ne veut plus entendre parler de dette européenne commune. Elle est elle-même confrontée à ses propres contraintes institutionnelles, qui freinent la dépense budgétaire. Quant aux grandes banques du continent, elles ne peuvent pas, à elles seules, porter des engagements d’une telle ampleur, même avec un coup de pouce réglementaire.

Vulnérabilité politique

L’épargne est la solution de bon sens, même si ce n’est pas la plus évidente. Elle est abondante en Europe, où les bas de laine pèsent près de deux fois le produit intérieur brut de l’UE, mais se trouve encore trop peu investie dans sa croissance. D’où l’idée française d’un produit d’épargne commun, sorte de Livret A ou de plan d’épargne en actions européen, dont les encours financeraient en priorité les infrastructures, les start-up, la défense et, pourquoi pas, à terme, l’énergie. Le travail est gigantesque. L’Europe pâtit depuis longtemps de marchés de capitaux moins efficients qu’outre-Atlantique, car plus fragmentés, ce qui en pénalise les entreprises, notamment les plus petites, qui cherchent à lever de l’argent. Du fait de son modèle social, elle n’a pas non plus de gigantesques fonds de pension à l’américaine pour financer son économie et lui garantir une forme de souveraineté actionnariale.

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