Plusieurs héritiers de la famille Mulliez, détentrice d’Auchan, Leroy-Merlin ou Decathlon, ont été mis en examen en 2019 dans une enquête sur des soupçons de fraude fiscale, a appris l’Agence France-Presse (AFP) de source judiciaire mercredi 1er mai, confirmant une information de Libération.
Ce dossier a été ouvert en 2012 après la plainte d’un ex-membre de la famille, Hervé Dubly, s’estimant lésé. L’information judiciaire, menée par un juge financier parisien, a abouti à des perquisitions et à la mise en examen en 2019 de Jérôme et Thierry Mulliez pour « abus de confiance » et « blanchiment de fraude fiscale ». Ils sont respectivement le petit-neveu et le petit-cousin de Gérard Mulliez, 92 ans et fondateur d’Auchan. Trois structures financières liées à la famille ont aussi été mises en cause en janvier 2023 pour blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée. Une membre de la famille Mulliez a quant à elle été placée sous le statut intermédiaire de témoin assisté en 2019.
Une sorte de pacte d’actionnaires régit la « galaxie » d’entreprises Mulliez à la structure complexe et opaque : elle mélange des sociétés civiles détenues par la famille et des holdings gérant les enseignes.
A l’origine de ces investigations, Hervé Dubly dénonce dans une première plainte à Lille « des prêts très élevés sans écrits et sans intérêts accordés » par des structures du groupe « à des sociétés étrangères (plusieurs centaines de millions) et à des personnes physiques via des sociétés civiles personnelles ou familiales (plusieurs millions) ».
Selon le plaignant, ces prêts opaques et sans justification apparente constituent un abus de confiance, notamment en ce qu’ils ne respecteraient pas l’égalité entre les associés. L’enquête se penche sur ce montage qui « pourrait permettre également une minoration de l’impôt en France (permettant par exemple de bénéficier de dividendes à l’étranger) et serait donc susceptible de recevoir la qualification de fraude fiscale aggravée ou de blanchiment de fraude fiscale aggravée », précise la source judiciaire.
L’Association familiale Mulliez se dit « totalement sereine »
En 2023, les juges d’instruction avaient clos une première fois leurs investigations. Mais depuis, la Direction des vérifications nationales et internationales (DVNI), chargée notamment d’enquêter sur les grandes entreprises et leurs filiales, a transmis au magistrat instructeur les pièces du contrôle fiscal toujours en cours, selon la source judiciaire.
Le versement de ces pièces en procédure pourrait décaler l’issue de celle-ci et en modifier les conclusions. Alors que selon une source proche du dossier, l’enquête porte bien « sur l’organisation des sociétés et holdings Mulliez » en général « plutôt que sur des dérives individuelles », l’Association familiale Mulliez (AFM), qui regroupe les héritiers de la famille, s’est dite auprès de l’AFP « totalement sereine » s’agissant d’une procédure « dénuée de tout fondement ».
« Nous nous sommes expliqués sur la parfaite régularité des opérations examinées. Elles n’ont pour seul objectif que la diversification d’investissements à l’étranger », a assuré l’association. « Les flux financiers sont totalement transparents et s’inscrivent dans une logique de développement économique. Aucun bénéfice fiscal n’était recherché, aucun bénéfice fiscal n’a été réalisé. Aucun », a encore insisté l’AFM.
L’association affiche par ailleurs son intention de « déposer immédiatement une plainte pour violation du secret de l’instruction, pour confondre ceux qui, après dix ans d’une enquête sans concession mais particulièrement sereine, tentent subitement d’instrumentaliser cette procédure et [de] faire pression sur la justice ».
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